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Destruction par tir d'un Chat forestier pris pour un Loup dans le sud lorrain : le nemrod jugé coupable

07 mars 2023

Nous n’avions volontairement pas fait écho de cette drôle d’histoire que nous allons vous conter avant d’avoir le rendu de décision du jugement du Tribunal qui est tombée ce 03 mars 2023.
 
L’histoire se passe durant l’hiver 2020 où sur l’ex zone de Présence Permanente (ZPP) de Saint-Amond (sud 54) sont mises en œuvre des tirs de défense simple pour protéger les troupeaux domestiques d’attaques récurrentes à cette époque du seul loup présent identifié.
 
Dans le cadre de l’une de ces opérations, un chasseur (que nous appellerons « Régis » pour préserver son anonymat) posté en limite d’une parcelle croit tirer à la tombée de la nuit sur LE Loup du secteur.
Persuadé du tir létal de son coup de carabine, il appelle le lieutenant de louveterie en charge de superviser les opérations de tir de défense.
 
Ce dernier l’invite à ne pas bouger avant son arrivée sur les lieux pour constater ses dires et de façon à pouvoir consigner l’acte de régulation, mais la tentation du nemrod est trop grande. Son cœur bat la chamade à l’idée d’avoir réussi à servir avec brio l’intérêt général par la régulation de ce vil prédateur œuvrant en ces terres depuis quelques années.
 
Il se rend donc jusqu’à l’animal tiré et la stupeur alors l’envahit ! Son tir entre chien et loup lui a fait confondre Chat (forestier) et Loup.
 
Vient le temps de la constatation par le Lieutenant de louveterie, puis la recherche de l’animal tiré avec un chien de recherche au sang pour tenter de retrouver l’animal blessé (qui a mystérieusement disparu entretemps…). Ce dernier malgré son flair, n’ira d’ailleurs pas plus loin que l’endroit de la mort du pauvre Chat forestier…
 
Puis vient la constatation du tir par les agents de l’OFB 54. Ces derniers trouvent sur place des fragments d’os, de sang, et de cervelle qui attestent qu’effectivement un animal est bien mort à cet endroit. Les quelques incohérences relevées dans les propos de Régis poussent ces derniers à réaliser une analyse génétique des tissus collectés sur place.
 
Les résultats tombent et la vérité éclate : il s’agit à 100% d’un Chat forestier !
 
Il faut savoir que le braconnage représente la première menace pour la conservation de l’espèce puisque 3 cas de braconnage de chats équipés de colliers émetteurs VHF sur ce même secteur en 3 années avaient été constatés dans le cadre d’une étude CNRS-LOANA. A l’époque une enquête a été menée suite à ces faits en 2010 à Pagny-la-Blanche côte mais n’a pu aboutir, faute de preuves. Puis un second cas a donné lieu à un jugement au Tribunal correctionnel en 2015 à l’encontre d’un chasseur ayant tué un Chat forestier sur la commune de Maxey-sur-Vaise (55).
 
Pour revenir à nos moutons, ayant eu vent de cette atteinte de 2020, plusieurs associations environnementales (GEML, Flore 54, LNE) dont LOANA se sont portées parties civiles. Ainsi elles ont défendu enfin en début d’année 2023 les intérêts du vivant et surtout les préjudices moraux et écologiques subis vis-à-vis du petit tigre des bois, dernier symbole, aussi petit soit-il, du sauvage et d’un milieu forestier encore libre et non maîtrisé par l’homme !
 
Régis a été condamné par le Tribunal judiciaire de Nancy :
- à verser une amende de 5000 euros avec sursis, car Régis chasse certes avec une carabine à lunette de visée à 2000 euros et une caméra thermique mais n’est pas solvable…
- au retrait de son permis de chasse pendant 5 ans
- à l’interdiction de porter une arme pendant 5 ans
- à la confiscation de sa carabine ayant servi à l’acte de braconnage. Les autres matériels (comme la caméra thermique) ayant mystérieusement disparu entretemps lors d’une seconde opération de saisie par l’OFB 54 !
- à verser aux associations environnementales au titre des préjudices moraux et écologiques : 6000 euros (1500 euros pour chacune des associations de défense du vivant).

Cette atteinte pointe également du doigt la faiblesse dans les formations envers les chasseurs qui réalisent les tirs de défense Loup au niveau national. Car hormis les lieutenants de louveterie, peu de chasseurs semblent suivre de formations spécifiques au Loup. On peut aussi s’interroger sur l’application sur le terrain de certaines prescriptions obligatoires intrinsèques au tir de défense « Loup », à savoir les conditions de visibilité et l’utilisation d’un phare portatif longue distance pour s’assurer de l’identification de l’espèce en cas de tir de nuit. Il y a peut-être des règles à revoir en haut-lieu !

Entre Chat et Loup, il n’y a qu’un pas …

La team « Petit tigre des bois » de LOANA

Auteur du dessin humoristique: Alex